Federer, l’homme à qui tout réussit : attention à la jalousie des dieux

federerLa réussite presque insolente de l’idole des Suisses force l’admiration. Elle rappelle cependant le cas de Polycrate de Samos : les dieux sont jaloux des hommes à qui tout réussit.

Pour les Suisses – et pour tous les amateurs de tennis – Roger Federer est devenu une idole sacrée. À nouveau parvenu à la place de n° 1 mondial du tennis à l’âge incroyable de 36 ans, il a aligné les succès d’une manière stupéfiante. Les journalistes sont à court de superlatifs, au point qu’on en vient à parler des « sept merveilles du monde de Federer ». Comment ne pas se laisser entraîner dans la Federer-mania ? D’ailleurs, on ne parle plus de Federer, mais simplement de Roger (prononcer ‘Rodjeur’), car il a son entrée dans tous nos salons équipés d’un téléviseur. Et comme il a lancé sa propre marque d’habits, il suffira désormais de parler de RF.

Et voici qu’un minable envieux vient gâcher la fête, probablement parce qu’il ne sait même pas tenir correctement une raquette de tennis. Allez savoir pourquoi, le succès phénoménal de RF rappelle à cet envieux l’histoire de Polycrate de Samos, l’homme à qui tout réussissait. L’historien Hérodote, un homme qui s’y connaissait en matière de rapports entre les hommes et les dieux, nous raconte comment la réussite de Polycrate a fini par susciter la jalousie des dieux.

Polycrate était le tyran de Samos, un île au large de l’actuelle côte de la Turquie. Il était riche et puissant, et rien ne lui résistait. Or il avait un ami en la personne du roi d’Égypte, appelé Amasis. Celui-ci, voyant le succès extraordinaire que Polycrate rencontrait en toute circonstance, commença à s’inquiéter pour lui. Il décida donc de lui écrire une lettre.

« Amasis communique à Polycrate ce qui suit. Il est agréable d’apprendre qu’un homme cher, avec lequel on entretient des liens d’hospitalité, rencontre le succès. À moi, cependant, les grandes réussites ne me plaisent pas, parce que je sais que la divinité est jalouse. D’une certaine manière, je souhaite pour moi-même, et pour ceux dont je me soucie, d’avoir parfois du succès dans leurs entreprises, et de parfois connaître l’échec, et qu’ainsi notre vie soit faite d’une alternance d’événements plutôt que d’une réussite continue. Je n’ai encore jamais entendu parler d’un homme qui, ayant réussi en tout, n’ait pas fini dans la pire déchéance. Si tu veux m’en croire, voici comment tu pourrais réagir à ton succès. Réfléchis à trouver l’objet qui a le plus de valeur à tes yeux, celui qui te ferait le plus de peine à perdre, et jette-le suffisamment loin pour que les hommes ne puissent le rattraper. Et si par la suite les succès ne viennent pas en alternance avec les souffrances, agis selon ce que je t’ai suggéré. »

[Hérodote 3.40]

Troublé par cette lettre d’Amasis, Polycrate décide de se séparer de son objet le plus précieux, un anneau de très grande valeur, qu’il jette à la mer. Quelques jours plus tard, cependant, un pêcheur apporte un magnifique poisson pour l’offrir au tyran. Lorsqu’on vide le poisson, on y trouve l’anneau de Polycrate… Ce dernier écrit à son ami Amasis pour lui raconter ce succès extraordinaire ; mais le roi d’Égypte, apprenant cela, décide d’en tirer les conséquences.

« Amasis lut la lettre que Polycrate lui avait envoyée et il comprit qu’il était impossible pour un homme de sauver un autre homme du destin qui l’attendait : Polycrate, qui rencontrait du succès dans toutes ses entreprises, allait connaître une mauvaise fin, puisqu’il retrouvait même ce qu’il jetait. Il envoya donc un héraut à Samos pour dissoudre les liens d’hospitalité qu’il entretenait avec lui. Il fit cela pour que, le jour où un terrible et important malheur frapperait Polycrate, lui-même ne soit pas affligé pour un homme avec qui il entretenait des liens d’hospitalité. »

[Hérodote 3.43]

Que conseiller à mon ami RF ? Peut-être devrait-il faire le tour de son appartement de Dubaï et chercher l’objet auquel il tient le plus : sa raquette de tennis ? un trophée du Grand Chelem ? sa Rolex ? Une fois qu’il aura trouvé, qu’il jette l’objet dans les profondeurs du Golfe Persique. Si ça ne marche pas, et qu’il retrouve sa raquette dans le ventre d’un poisson, qu’on me le fasse savoir bien vite. Je ferai alors promesse solennelle de ne plus regarder un match disputé par RF, de peur d’assister à la catastrophe réservée à celui qui semble avoir obtenu une clé pour entrer dans la demeure des dieux.

[image: mon ami RF]

2 réflexions sur “Federer, l’homme à qui tout réussit : attention à la jalousie des dieux

  1. Ήταν ο Σοφοκλής; οπωσδήποτε οι Έλληνες νομίζουσαν ότι δεν πρέπει να πούμε πολύ νώρις αν ένας άνθρωπος είναι ευτυχισμένος ή όχι. Πρέπει τουναντίον να περιμένουμε μέχρι την τελευταίαν ημέρα του και μόνο μετά μπορούμε να πούμε αν η ζωή του ήταν μια πλήρης επιτυχία. Μέχρι το τέλος, δεν το ξέρουμε ακριβώς. Σ’ αυτη την άποψη ο RF με 36 χρονών είναι ακόμα μάλλον νέος.

    Κατά την άποψή μου, ο Άμασις αφ’ενός έχει δίκιο και αφ’ετέρου δεν έχει δίκιο. Έχει δίκιο όταν γράφει ότι καλό είναι ένας άνθρωπος να έχει και επιτυχίες και αποτυχίες. Είναι σημαντικές και οι αποτυχίες για τον χαρακτήρα ενός ανθρώπου για να μάθει πως ξεπερνούνται οι δυσκολίες. Αλλά ο Άμασις δεν έχει δίκιο όταν γράφει ότι το θείο φθονεί. Αυτό είναι αρχαία δεισιδειμονία, την οποία δεν έχουμε πια στην κοινωνία μας. Και ότι ο Άμασις παίρνει την φιλία του πίσω, επειδή στο μέλλον ο Πολυκρατής θα έχει σίγουρα μια μεγάλη αποτυχία, είναι μια παρά πολύ μεγάλη επιφύλαξη η οποία είναι άδικη.

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  2. Λάθος: οχι « νομιζουσαν », αλλά « νόμιζαν ».

    Άλλα λάθη υπάρχουν σίγουρα, αλλά γράφω για άσκηση, όχι για να παράγω τελεία κείμενα.

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