En 356 av. J.-C., un fou met le feu au temple d’Artémis à Éphèse, dans l’espoir que son nom sera ainsi transmis aux générations futures.
La déesse Artémis résidait dans la cité d’Éphèse, sur la côte de l’Asie Mineure (actuellement Turquie). Un premier temple est érigé en son honneur autour de l’an 600, mais non achevé. Il faut attendre 560 pour que, avec l’aide du roi lydien Crésus, l’on construise un temple splendide qui comptait parmi les sept merveilles du monde. En 356, ce même bâtiment est incendié par la main d’un fou, comme le rappelle l’historien latin Valère Maxime. Il parle évidemment de Diane, l’équivalent romain de la déesse grecque Artémis.
« Il s’est trouvé un homme pour vouloir mettre le feu au temple de Diane Éphésienne, afin que son nom soit disséminé à travers tout le monde une fois que cet ouvrage d’une beauté extraordinaire serait consumé. C’est du moins cette folie de l’esprit qu’il a dévoilée après avoir été soumis à la torture. Or les Éphésiens ont pris la sage décision de faire disparaître le souvenir de cet homme tout à fait détestable, et cela se serait ainsi réalisé si la propension de Théopompe à beaucoup bavarder n’avait pas inclus ce personnage dans ses histoires. » Voir Valère Maxime 8.14.5.
Ce témoignage nous apprend que, après l’incendie du temple, un suspect a été arrêté. Sous la torture, il a avoué son forfait ; nous savons aujourd’hui ce que valent des aveux arrachés par de tels procédés. Quoi qu’il en soit, l’incendiaire présumé aurait commis son acte dans l’espoir que l’on continuerait de parler de lui à l’avenir. Valère Maxime, respectueux de la volonté des Éphésiens, se garde bien de contribuer à une telle publicité, mais il nous signale qu’un autre historien – Théopompe, un Grec bavard – aurait transmis le nom du criminel. L’enquête risque cependant de tourner court, puisque les écrits de Théopompe ne sont pas conservés…
Il faut alors se tourner vers un autre érudit grec dont les écrits, eux, ont été transmis à la postérité : il s’agit du géographe Strabon. Celui-ci nous parle précisément du même temple d’Artémis.
« Chersiphron fut le premier constructeur du temple d’Artémis, puis un autre en fit un plus grand. Comme un certain Hérostratos l’avait incendié, ils en construisirent un autre meilleur en rassemblant les bijoux des femmes ainsi que leurs biens propres, en vendant aussi les colonnes du temple précédent. » Voir Strabon, Géographie 14.1.22.
Voilà, maintenant nous savons : l’incendiaire présumé s’appelait Hérostratos. Si telle était vraiment son intention, il aura réussi l’exploit de détruire l’une des sept merveilles du monde et de faire parler de lui plus de deux millénaires après son forfait. Mais peut-on se fier à des aveux obtenus par la torture ? Seule Artémis saurait nous dire qui a détruit son temple. Quant au nouveau temple, construit sur les ruines fumantes du précédent, il n’en reste hélas pratiquement rien aujourd’hui.
[Image : reconstitution de l’aspect du temple d’Artémis à Éphèse ; d’après http://www.ephesus.ws]